La culture à couper le souffle
Chronique de Margaux Voglet / Photos de Margaux Voglet
Ce samedi 20 février, les acteurs du milieu culturel se mobilisaient pour qu'on ne les oublie pas, pour appeler à l'aide et pour montrer qu'il est possible de faire vivre la culture sans prendre de risque.
Un peu partout dans le pays, des actions artistiques et politiques ont été organisées, tantôt poignantes, tantôt drôles ou surréalistes. Still Standing For Culture.
La province de Namur n’est pas en reste, une multitude d'initiatives ont pris place dans l’espace public. Parfois, elles sont le résultat d’actions privées, comme pour cette chaîne humaine autour du Delta, pôle culturel de la Province. Ici, une plasticienne a réuni, par le bouche-à-oreille, une centaine de personnes main dans la main, ou presque. Pied de nez à la pandémie, tout en restant en sécurité.
La sécurité des événements culturels, c’est aussi ce que met en avant les organisateurs de Namur en Mai. Ceux-ci ont décidé de monter, en quelques jours, un spectacle silencieux ponctué d’interventions éclairées comme celle de Christine Mahy (secrétaire générale du Réseau wallon de lutte contre la pauvreté), de psychologues ou de représentants du public. Les programmateurs de cette manifestation veulent montrer qu’il est possible d’organiser des concerts, des spectacles, des expositions, des festivals, en respectant les règles et sans mettre à mal la santé publique. Les artistes privés de voix et de musiques nous rappellent que la culture est essentielle au bien-être de chacun.
Encore plus prenant que ces prestations muettes : cet arrêt sur image, Place d’Armes. Artistes et membres du public sont comme figés, stoppés net dans leur art. Il n’y a que leurs ballons blancs qui volent au gré du vent. Une longue salve d'applaudissements interrompt cette paralysie glaçante. À couper le souffle.
Des applaudissements, c’est aussi ce qu’on entend, un peu plus loin, dans la rue des Brasseurs. L’ Arsène Café, tenu par Maud et Elena, met les artistes en vitrine.
Le groupe La Hordeest, là, derrière la vitre, enfermé mais pas muselé, comme la culture depuis des mois. La situation ne l’empêche pas de jouer, les passants sourient derrière leurs masques, quelques pas de danse au milieu d’une rue, comme une bouffée d’oxygène, nous prouvent, encore une fois, ô combien la culture est essentielle.
Au Caméo, les tickets suspendus contiennent des messages d’amour, d’espoir et d’encouragement. Les visiteurs témoignent, avec leurs mots sur le papier, de leur soutien au milieu du cinéma et à la culture en général.
#StillStandingForCulture (1). Alithéa est compositrice de musique classique contemporaine. Elle a déjà été victime de 6 projets repoussés. Pour son doctorat en composition, elle devait se rendre à Montréal. Au lieu d'un voyage au Québec, c'est devant son ordinateur qu'elle est contrainte de suivre les cours. C'est vraiment compliqué l'enseignement à distance ! Elle est d'ailleurs obiligée de s'en servir également avec ses propres étudiants. Ceci ne l'empêche pas de souhaiter systématiquement "Courage" à ses élèves en fin de séance. Etre fort et optimiste, c'est nécessaire en temps normal. En cette période de pandémie, ce l'est encore plus.
"Humans of Namur"
Terminons cette tournée namuroise par le nouveau parc animalier ouvert pour l'occasion, dans le parc de l’abbaye de Floreffe, Zah! créé par l’organisation d’Esperanzah! Les festivals ne sont pas autorisés, qu’à cela ne tienne, l’équipe a prévu un grand safari. Séparés en groupe, les visiteurs découvrent les artistes et techniciens en cage. “Interdiction de nourrir les artistes”, “Ceci n’est pas un spectacle”, “On a les croo”, “Show must go on”. Les slogans sont nombreux et inventifs, l’action est à mi-chemin entre manifestation politique et festival. Zah! nous offre un moment hors du temps.
Une bulle d’air nécessaire.
En ce samedi ensoleillé, tellement d’autres initiatives publiques ou privées ont secoué la province de Namur, qu'il serait impossible de toutes les citer.
Puissent les applaudissements et les rires de cette journée se faire entendre jusqu’au gouvernement. Puissent nos politiciens comprendre à quel point la culture est une poésie essentielle au monde. Puissions-nous bien vite retrouver notre oxygène tout en ayant le souffle coupé par la culture.
Still Standing For Culture.